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Mateus Araujo Silva2

Le temps (l’asservissante notion de temps) est aboli, le film Est. Politiquement, Straub ne se réconcilie pas avec le vieux cinéma ni ne cède aux concessions lucratives de la révolte. Il ne permet pas non plus que ses personnages d’une Allemagne de l’après-guerre se réconcilient avec les nouveaux politiciens civils, démagogues et dangereux comme les vieux nazis. Non-réconciliésmet en garde contre le compromis. C’est un essai sur l’intransigeance, c’est un film intransigeant. Le modèle de l’essai politique cinématographique. La vision, la re-vision et l’étude de ce film permettront au lecteur d’évaluer l’importance et la rigueur de Jean-Marie Straub"

(Le Siècle du Cinéma, 2006, p.290-1 / O Século do cinema, ré-éd. 2006, p.350).

 

 

A ce moment-là, Rocha n'avait pas encore vu la Chronique, dont la première projection mondiale avait eu lieu le 3/2/1968 au Festival d'Utrecht. Il le verra entre avril 1968 et avril 1969, où il en parle comme un "chef-d'œuvre" très différent de son propre cinéma (interview à René Capriles et F. Cárdenas de 27/4/1969, inclus dans Revolução do cinema novo, 1981 / Rééd. CosacNaify, 2004, p.181). Dans son deuxième texte le plus frontal sur Straub, du 4/4/1970, il commente les trois premiers longs, Non réconciliés, la Chronique et Othon, en guise de présentation de Straub au lecteur de la conversation chez Gianni Barcelloni dont la transcription vient ensuite : 

 

 

"Marié à la cinéaste française Danièle Huillet, Straub est apparu en 1965, au Festival de Pesaro, avec un film d'une heure intitulé Non réconciliés, pamphlet et réflexion politique sur la résurgence du nazisme en Allemagne. Le sujet était fort, mais c'était la façon dont Straub filmait qui a déroutée la critique. Il détruit toutes les notions de spectacle, toutes les célèbres 'notions de cinéma' que puisse avoir un critique ou un spectateur. Il met simplement les acteurs immobiles, de dos ou de profil, durs, et filme les sons, voilà son jeu! Pour Straub, le cinéma est chose physique, concrète. Dans son langage simple et désespérant, cela veut dire : des acteurs immobiles dans de dialogues de haut niveau littéraire. Scènes fixes longuissimes. Le mouvement est donné par le rythme de la parole. Dans le cinéma de Straub, la parole devient musique. Et la musique devient parole dans le film suivant,