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Mateus Araujo Silva2

Il s'agira dans ces notes d'un autre foyer du dialogue avec le cinéma des Straub, celui du cinéma brésilien moderne. Renonçant d'avance à l'inventaire exaustif, qui devrait prendre en compte des textes qui leur ont été consacrés par d'autres cinéastes brésiliens d'envergure (Júlio Bressane7, Arthur Omar8, Paulo César Saraceni9), ainsi que d'autres films brésiliens présentant des échos du cinéma des Straub, j'envisage ici ce dialogue à partir du seul cas de Glauber Rocha (1939-1981), dont je propose une approche préliminaire, une sorte de premier tour de recherches et de discussions, à reprendre et à approfondir plus tard.

Dans la section I, je me concentre sur les textes critiques de Rocha consacrés aux Straub10, avant d'aborder brièvement dans la section II le dialogue qu'il a entretenu, en cinéaste, avec leur travail, et notamment celui entretenu par son long-métrage romain Claro (1975) avec leurs deux films romains et demi – Les Yeux ne veulent pas de tout temps se fermer (1969) d'après Othon, Leçons d'Histoire (1972) et quelques plans romains dans Introduction à la 'Musique d'accompagnement pour une scène de film' d'Arnold Schoenberg (1972).

 

 

I

 

Rocha a pris connaissance du cinéma des Straub en 1967, l’année où il a vu Non réconciliés en Europe. Il a été impressionné par le film, jusqu'au point de donner à Straub, à Berlin, l'argent d'un des prix obtenus par Terre en Transe aux Festivals de Cannes et Locarno11, pour aider ses collègues à produire Chronique d'Anna Magdalena Bach, tourné entre août et octobre 1967 en Allemagne. Sans jamais mentionner ce don qui aura peut-être inauguré leur amitié12, Rocha évoque dans plusieurs textes et entretiens de 1968 à 1976 leurs rencontres et leurs conversations sur le cinéma et le monde, devenues plus constantes à Rome, où les Straub s'installèrent en 1969, et où Rocha a habité ou séjourné à plusieurs reprises entre 1969 et 1975. Parmi les sujets de leurs conversations au fil des rencontres, Rocha évoque leurs propres films, mais aussi Buñuel, Brecht, Lubitsch, Pasolini, Minnelli, Gianni Amico, Bach, le Cinema Novo brésilien, l'industrie cinématographique, le plan séquence, Henri Langlois et l'histoire du cinéma13 ...