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Jean-Yves Petiteau

La voix est la présence de celui qui est absent, et l’île en attente dans le mouvement de caméra qui la recueille devient en profondeur le lieu d’émergence d’une identité singulière.

 

La voix hante le lieu, la force du récit relève moins de l’histoire explicite que du mystère qu’elle recouvre par son absence.

 

Jean-Marie Straub a repris le texte dans son intégralité. Cette fidélité au récit de son auteur « Jean Bricard» assigne une valeur inattendue au paysage qui semble n’apparaître que dans cette convocation par la parole.  

 

L’articulation, entre le silence et la voix, inscrit dans le lieu une relation entre visage et paysage tel que l’évoque Deleuze :

« Le visage construit le mur dont le signifiant a besoin pour rebondir, il constitue le mur du signifiant, le cadre ou l’écran. Le visage creuse le trou dont la subjectivation a besoin pour percer, il constitue le trou noir de la subjectivité comme conscience ou passion, la caméra, le troisième oeil »5

Ce récit s’inscrit dans un projet que Jean-Marie Straub et Danièle Huillet ont réalisé ensemble, ce film est à la fois une œuvre partagée et une homélie.

 

Par ce que font Jean-Marie Straub et Danièle Huillet, le récit prend une force considérable. C’est la première fois que Straub, lors d’une interview, parle « d’une sorte de documentaire6 », mais à la différence des documentaires réalistes où s’articulent les questions du journaliste et les réponses d’un "témoin". Ici, celui qui parle ne répond pas aux questions, son récit est le récit d’un lieu, Il n’y a aucun arrêt, même quand la caméra s’arrête. Et ce mouvement est celui d’une lente apparition.

Lubtchansky, du repérage à la réalisation, est l’homme de confiance pour toutes les prises de vue.

Pourtant il s’étonne en cours de tournage de ne pas savoir ce que Jean-Marie Straub va faire du récit de Bricard qui à première vue n’est pas un « texte littéraire ou poétique ».

 

La voix de Jean-Bricard est-elle, ou apparaît-elle comme un poème ?