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Hélène Raymond

La dissolution finale de l’image accompagnée de la musique de Bach fut au cœur d’une discussion entre Straub et Godard au festival de Locarno en 196815. Godard adopte une position de moindre radicalité esthétique, même si elle cherche la radicalité politique, en pensant que le film aurait dû être conclu par une phrase comme : « Tout est politique ». Pour Straub et Huillet cet ajout est impossible parce qu’il répéterait la fin du Journal d’un curé de campagne de Bresson qui se termine sur les mots : « Tout est grâce ». Or, le fondu au blanc accompagné du mouvement ascendant de la caméra et d’une envolée musicale exprime, dans Non réconciliés, l’équivalent de cette phrase du curé de campagne au moment de son agonie. Les cinéastes ne veulent pas de redondance des mots par rapport à l’image, mais le moment de grâce qui suit le geste de Johanna dit bien que « tout est politique ». Symétriquement opposé aux deux monuments qui apparaissaient pendant le générique d’ouverture, le plan final conclut la question du monument par la dissolution de la forme. Comme monument, Non réconciliés s’efface, comme œuvre d’art, il s’en remet au spectateur.