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Ce qui reste
Rose Mansion

On ne m 'avait jamais montré le réel au cinéma, avant ? « Mais c'est pas la réalité, tu crois qu'Othon est encore vivant ? Est-ce qu'il à jamais existé d'ailleurs ? C'est pas la réalité ! ». Oui, mais non. Tu as vu le papillon qui traverse l'espace quand ils parlent à côté de la fontaine ? Tu as entendu le bruit de la circulation en bas des collines de Rome ? Pour une fois personne n'a cherché a nous mentir, même pour nous faire plaisir ; je devrais peut être dire pour nous divertir. Beaucoup sont partis, et nous étions de moins en moins nombreux au début de chaque séance. Je me disais que ça ne ferait sans doute pas le bonheur des auteurs.

L'entremetteur de cette première rencontre était Jean Sébastien Bach, sa musique plutôt. Il est possible que je sois restée pour ça. Elle aidait en quelque sorte à apprivoiser ce type de cinéma, ces images dénuées de lumières indéfiniment retravaillées, et de couleurs séduisantes, pour cette fois.

Voir les films de Danièle Huillet et Jean-Marie Straub, c'était un peu comme apprendre une nouvelle langue, une langue dure, rêche, presque antipathique ; qui se révèle enveloppante et presque rassurante. C'était en quelque sorte comme si je rentrais dans un bâtiment d'aspect austère et solennel et que je m'y sentais accueillie sans une once de froideur. Ces films, si je ne les ai pas tous appréciés (à leur juste valeur ?), m'ont parfois mise à rude épreuve. Ils ont pu me sembler longs, éprouvants. Je ne suis pas partie, même lors de la projection de ceux au seuil desquels je suis restée. Parce que (sauf avec Amerika : Rapport de classe) j'étais ailleurs tout en étant ancrée solidement dans le monde réel. Mais aussi parce que j'attendais ce que j'avais trouvé dans les autres. Une narration, peut être, mais comme la vie en crée, une histoire « vraie ». Pas au sens d'un téléfilm relatant un fait divers, non ; vraie parce qu'on ne cherche pas à me convaincre que ça aurait pu se passer. Bien sûr il y a un scénario, et tout est défini avant que la caméra ne se mette en route. Mais ils ne cherchent pas à me le cacher, à enrober, à séduire. Un des aspects qui peut paraître rude au premier abord dans les films de Straub et Huillet c'est la manière dont la parole est traitée, par exemple dans Othon.